Partez à la rencontre de Gaston Pïcavet, maire de Wambrechies de 1925 à 1944, raconté par son neveu Bernard Picavet.
Chargé de mission et de médiation culturelle et pédagogique à La Coupole, Centre d'Histoire et de Mémoire du Nord-Pas-de-Calais, Théo Hooreman est aussi un Wambrecitain passionné d'Histoire.
Vous l'avez peut-être déjà rencontré lors d'une visite guidée de la Distillerie, du fort du Vert Galant, ou en vous rendant au Musée de la Résistance de Bondues.
Il vous invite à remonter le temps, à la rencontre de certains grands personnages qui ont fait l'histoire de Wambrechies.
Théo Hooreman : Qui était Gaston Picavet ?
Bernard Picavet : Mon oncle, né en septembre 1889, était l’aîné d’une famille d’agriculteurs de 11 enfants.
À son retour après la Grande Guerre, Gaston Picavet a acquis un des estaminets de la place appelé « Le Grand Logis ». À l’étage existait une grande salle de réception qui pouvait accueillir jusqu’à 100 personnes.
Je me rappelle du pilier métallique installé à l’étage du dessous qui soutenait le plancher à l’occasion de ces réceptions, pour éviter que tout ne s’écroule… De nombreux wambrecitains doivent y avoir attaché des souvenirs !
Avec des agriculteurs de la commune, il a créé la coopérative des cultivateurs « Lille-Ouest ». Elle leur permettait d’acheter en commun semences et engrais et aussi de vendre leurs céréales. Il en était le directeur et a exercé cette fonction jusqu’à son décès.
Que pouvez-vous nous dire sur son mandat ?
Gaston Picavet a été élu maire de Wambrechies en 1925, sous la IIIème République. Son action a été multiple : création de jardins ouvriers, installation de l’horloge sur le clocher, électrification de la commune…
En 1936, alors que les usines de Wambrechies sont en grève, il accorde une subvention pour venir en aide aux grévistes les plus démunis.
Gaston Picavet a aussi été attaché à l’école : il installe dans les classes un nouveau mobilier et de nouveaux manuels. Lorsque les élèves manquent trop l’école, une liste est donnée au garde-champêtre pour que cela ne se reproduise plus !
Afin d’utiliser judicieusement les fonds reçus en donation par la commune, Il a initié le projet de construction de la Fondation Ledoux qu’il préconisait à la destination de fonctions sociales : dispensaire, maternité…
Pouvez-vous nous parler de son rôle pendant l’Occupation ?
En 1940, Wambrechies est occupée par les troupes allemandes. Par arrêté préfectoral, mon oncle est maintenu dans ses fonctions. Il aurait pu abandonner au regard des difficultés que cela impliquait mais il dira en 1942 : « j’ai fait en toutes circonstances durant ma carrière politique ce que me dictait ma conscience, mon devoir, rien que mon devoir, tout mon devoir ».
C’est une période très difficile pour la commune et pour le maire : restrictions, réquisitions, laissez-passer, logement des soldats chez l’habitant et une Kommandantur qui décide de tout. En novembre 1940, la flèche de l’église tombe au cours d’une tempête, elle avait été déboulonnée par les troupes allemandes car elle gênait le décollage des avions depuis l’aérodrome.
Que se passe-t-il pour Gaston Picavet à la Libération ?
À l’heure des règlements de comptes, quelques résistants se présentent chez lui et l’enferment à l’usine Prate. Il lui est reproché d’être resté en poste pendant l’Occupation et d’avoir été trop en relation avec les Allemands. Il rédige alors une lettre expliquant aux habitants son action pendant la guerre et la difficulté de sa position. Il est ensuite remplacé à son poste par le résistant Germain Marquillies.
A-t-il eu d’autres ambitions politiques pendant sa carrière ?
Oui. En 1932, Gaston Picavet se présente pour devenir député. Populaire à Wambrechies, la circonscription va cependant jusqu’à Lille où il est peu connu. C’est le sens du chant humoristique « L’député-maire » qui est interprété à cette occasion. Il est finalement battu par Louis Nicolle, industriel à Wambrechies.
Avez-vous d’autres anecdotes à partager ?
En raison de son implication dans les milieux agricoles, Gaston Picavet était entré au Conseil d’Administration de la Foire commerciale de Lille. Dans le cadre de cette fonction, alors que la « Foire commerciale » était inaugurée cette année-là par le Président De Gaulle, il a eu l’honneur de lui offrir en respect du « trou flamand » un verre de genièvre Claeyssens de Wambrechies de sa propre réserve, datant de 1921 !